Daniel - Lesur

Composition musicale
Élu(e) le
Prédécesseur
Né(e) à
Paris
Le
Date de décès
Daniel-Lesur

"Notons ces deux points de référence : Jean-Philippe Rameau, Maurice Ravel ; ainsi que l’attachement à une certaine notion de la musique française - avec ses constantes, son idéal, son point d’équilibre qui se situe entre la sagesse et la fantaisie, l’ordre et la liberté, la tradition et l’audace, le cœur et l’esprit ". Ainsi trouvons-nous d’abord chez Daniel-Lesur un musicien de tradition et de culture exclusivement françaises. […]

Pour le musicien sensualiste qu’est Daniel-Lesur, l’abstraction est à la fois péché contre l’oreille et contre l’esprit. Aux conjectures d’ordre cérébral il oppose une évidence d’ordre sensible. Mais avant tout, Daniel-Lesur prône la liberté de l’esprit, la liberté de la création : "La musique ne vit pas de querelles esthétiques. Elle vit d’amour...". Il s’oppose résolument à tous les "académismes", qu’ils soient conservateurs ou révolutionnaires. " Réjouissons-nous de ce qu’un esprit de large libéralisme anime aujourd’hui l’enseignement. Il n’est, pour nos jeunes, que d’y répondre par un égal effort de discipline personnelle. Ils ont la chance d’étudier en un temps où les préjugés ont du plomb dans l’aile. Il ne subsiste plus beaucoup de ces magisters que nous avons connus, péremptoires, repus de solennité, dont les sentences demeuraient sans appel. La musique semblait se limiter, pour eux, à l’eau du bocal où ils évoluaient, sans souci du vent ni de la marée". […]

Daniel-Lesur réclame pour le musicien les bienfaits de la liberté, mais aussi les risques qu’elle comporte. S’il y a dans son sensualisme une morale du plaisir musical, cette morale n’est certainement pas aisée à pratiquer. Défendre les droits de l’oreille et ceux de la sensibilité, cela entraîne, en contrepartie, que l’artiste se défende contre les pièges de la facilité. En raison même de la séduction que les éléments sensibles de la musique opèrent sur lui, Daniel-Lesur les veut purifiés, décantés, spiritualisés. Et l’oreille n’a a raison, en définitive, que dans la mesure où elle obéit à une exigence plus haute. Fermeté du dessin mélodique, sévérité de la forme, concision des développements, cristal des harmonies où se réfracte une lumière qui, à la manière de l’intelligence illuminant les vers de Valéry, est un reflet de l’esprit. Abandons du cœur, mais retenus, mesurés; effusions de l’âme, mais contrôlées, pour que les faux-semblants ne tiennent pas la place réservée à ce qui appartient à l’esprit. Musique pure au sens non pas abstrait, cérébral, mais physique et spirituel du terme. Le jardin féerique est jardin de l’esprit , jardin de l’âme. Et la liberté, pour s’accomplir, exige le respect de la matière sonore, le souci d’une forme parfaite. Assouplir les formes reçues, refuser les solutions toutes faites, rejeter les règles académiques, mais se forger des chaînes et tenir pour adorables les contraintes qu’elles nous imposent. Maîtriser les élans du cœur, car tout excès détruit l’harmonie de l’œuvre. "La violence musicale est aveu d’impuissance, renoncement à la beauté. La force véritable est de la vitalité dominée. Engendrée par l’émotion, elle soulève, porte, exalte la matière sonore sans la briser" (Daniel-Lesur : Interludes [Musica, septembre 1958]). Le romantisme dominé d’une œuvre comme le poème symphonique Andrea del Sarto, l’ordre et l’imprévu de la Passacaille pour piano et orchestre, le profond accord de la sensualité et de la spiritualité dans le Cantique des Cantiques, montrent que pour Daniel-Lesur une telle éthique n’est pas restée lettre morte.


Distinctions : 
Grand officier de la Légion d'honneur
Commandeur des Arts et Lettres
Commandeur de l'Ordre National du Mérite

Œuvres