Bernard Zehrfuss, le musée caché dans la colline

Avec le Musée de la civilisation gallo-romaine à Lyon (1967-1975), l’architecte Bernard Zehrfuss, Secrétaire perpétuel de l’Académie des Beaux-Arts de 1994 à 1996, a investi un site historique classé pour y intégrer un musée à l’architecture intérieure résolument moderne.

Face à l’odéon romain, l’idée de Zehrfuss est d’entailler la colline de Fourvière pour libérer l’espace nécessaire à la construction du musée. La façade sud est recouverte par le talus reconstitué dans son inclinaison initiale et les gradins de la colline remodelée répondent à l’amphithéâtre romain cadré par deux «canons à lumière». Gothique par sa structure et baroque par son jeu d’obliques et de courbes irrégulières, ce musée, œuvre de maturité, sera son dernier édifice d’importance.

L’histoire du Musée de la civilisation gallo-romaine de Lyon, dernière œuvre emblématique de Bernard Zehrfuss, se confond avec celle de la fondation de Lugdunum sur la colline de Fourvière où les Romains avaient aménagé le théâtre d’Auguste, l’odéon et le temple de Cybèle. Illustration magistrale des recherches de Zehrfuss sur l’« architecture invisible », ce bâtiment est l’exemple même d’une réflexion globale sur le plan, la coupe et la structure. Une entaille pratiquée dans la colline permet à l’architecte de poser son édifice au pied de l’odéon romain, où il semblait impossible de construire. Le respect du lieu va jusqu’à l’enfouissement du musée dans la colline : recouverte de terre pour restituer le talus, la construction développe une parfaite stratégie de l’effacement.

Formée de deux rangées de dix triples portiques, la structure de l’édifice explore les potentialités de la ligne oblique et des arcs-boutants. Au-delà des défis techniques liés à la mise en œuvre de cette « cathédrale » de béton souterraine, le musée dévoile à l’intérieur une scénographie d’avant-garde pour l’époque : l’architecture, avec ses perspectives et ses cadrages, s’ajuste aux œuvres présentées et non l’inverse. Le visiteur va ainsi de découverte en découverte. Le parcours est conçu comme une promenade en pente douce. Un bel escalier hélicoïdal en béton brut coiffé d’un plafond à marguerite relie le hall d’accueil au début de la visite. Par plans successifs ou par la rampe centrale, on descend d’une extrémité du bâtiment à l’autre pour aboutir à la sortie basse face aux ruines. Deux canons à lumière, braqués sur l’extérieur, révèlent le site archéologique, en osmose parfaite avec les collections. Le musée témoigne d’une expression plastique puissante et d’une grande liberté. 

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Le site archéologique du Musée de la civilisation gallo-romaine de Lyon (1969-1975), Bernard Zehrfuss architecte. Photo DR et CAPA / MMF / Marielle Blanc
Le site archéologique du Musée de la civilisation gallo-romaine de Lyon (1969-1975), Bernard Zehrfuss architecte.
Photo DR et CAPA / MMF / Marielle Blanc
Vue de l'intérieur du Musée de la civilisation gallo-romaine de Lyon (1969-1975), Bernard Zehrfuss architecte. Photo DR et CAPA / MMF / Marielle Blanc
Vue de l'intérieur du Musée de la civilisation gallo-romaine de Lyon (1969-1975), Bernard Zehrfuss architecte.
Photo DR et CAPA / MMF / Marielle Blanc
L'escalier principal du Musée de la civilisation gallo-romaine de Lyon (1969-1975), Bernard Zehrfuss, architecte. Photo Christian Thioc
L'escalier principal du Musée de la civilisation gallo-romaine de Lyon (1969-1975), Bernard Zehrfuss, architecte.
Photo Christian Thioc