Germaine Acogny, lauréate du Grand Prix en chorégraphie

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Germaine Acogny 2015  Photo Thomas Dorn
À un endroit du début, chorégraphie et interprétation de Germaine Acogny, 2015.
Photos Thomas Dorn

Sénégalaise et française, la danseuse et chorégraphe Germaine Acogny est considérée comme la mère de la danse africaine contemporaine. Elle a mis au point une technique de danse africaine moderne certifiée.

En 1977 elle est nommée directrice artistique de Mudra Afrique (l’école de Maurice Béjart) à Dakar. Depuis, devenue émissaire de la danse et de la culture africaines, elle danse, chorégraphie et enseigne à travers le monde.

Germaine Acogny est la fondatrice avec Henri Vogt de l’École des Sables, Centre International de Danses Traditionnelles et Contemporaines d’Afrique.

Elle a reçu de multiples distinctions en France, Chevalier de l’Ordre du Mérite, Officier et Commandeur de l’ordre des Arts et Lettres, Chevalier et Officier de l’Ordre de la Légion d’Honneur, et au Sénégal, Chevalier de l’Ordre National du Lion, Officier et Commandeur des Arts et Lettres ; ainsi que le prix d’Excellence de la CEDEAO, catégorie Arts et Lettres (2019) et le Lion d’Or de la Biennale de Venise (2021).

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Il faut partir de « l’originaire » pour aboutir à l’original

Rencontre entre Germaine Acogny et Didier Deschamps, correspondant de la section de chorégraphie

 

Didier Deschamps : Vous êtes actuellement à l’affiche du Théâtre de la Ville à Paris dans une pièce et mise en scène de Mikaël Serre. Qu’est-ce qui vous anime, vous pousse à continuer encore et toujours, à être sur scène à près de 80 ans et après votre remarquable carrière ?

Germaine Acogny : Que répondre si ce n’est que j’ai ce besoin... encore et toujours ! C’est la scène qui m’aide à continuer.

 

D.D. : Vous êtes danseuse, pédagogue, chorégraphe et cheffe de troupe, mais vous avez régulièrement souhaité collaborer avec d’autres artistes tels Salia Sanou ou Olivier Dubois. Pourquoi cette envie de vous confronter aux énergies et visions d’autres artistes ?

G.A. : J’aime donner et recevoir, j’apprécie le dialogue intergénérationnel avec les plus jeunes. Ces rencontres sont fructueuses pour tous. Avec Salia, il y a une forme de reconnaissance, de transmission puisqu’il a étudié à l’école des Sables. Avec Mikaël Serre, c’est mon envie de faire du théâtre qui a motivé nos différentes collaborations. Quant à Olivier Dubois, nous avons eu une rencontre assez exceptionnelle, et cela a donné Mon élue noire sur la musique du Sacre du printemps de Stravinsky.

 

D.D. : Vos créations adressent-elles un message de nature politique, une protestation ou un témoignage sur le monde, comme par exemple votre solo Sahel, ou Fagaala chorégraphié avec Kota Yamasaki et consacré au génocide du Rwanda ?

G.A. : Je réagis et me sers de l’actualité, de ce qui me touche et me fait bouger. J’essaie d’apporter un peu de beauté dans le monde qui en a bien besoin !

 

D.D. : On a l’impression que Le Sacre du printemps tient une place particulière dans votre parcours.

G.A. : Dans la musique de Stravinsky et la thématique, tout me renvoie à l’Afrique et à ses traditions : le rituel et le sacrifice d’une femme, les tremblements, la mobilisation très spécifique de la colonne vertébrale, la terre et le sol que l’on martèle sont comme les danses exécutées pour purifier le village au moment des récoltes par exemple. On le ressent très fort ! Déjà Maurice Béjart voulait que je sois son élue lorsqu’il a créé sa célèbre chorégraphie ; Olivier Dubois l’a fait pour moi trente ans plus tard avec Mon élue noire. Enfin Salomon Bausch, le fils de Pina, a souhaité que les danseurs de mon École des Sables reprennent le Sacre chorégraphié par sa mère, et ils le font très bien tant ils comprennent intensément la charge tellurique de la pièce. Ce qui compte n’est pas le respect de la technique et de la forme, mais la compréhension profonde des énergies qui traversent le groupe et l’espace.

 

D.D. : Vous êtes franco-sénégalaise et avez reçu diverses formations chorégraphiques et pédagogiques. Quelle est la place, la trace des danses traditionnelles que vous avez pu connaître et pratiquer ?

G.A. : Elle est essentielle ! C’est sur les traditions que s’appuient les danses d’aujourd’hui. Il faut partir de « l’originaire » pour aboutir à l’original. S’appuyer sur le patrimoine pour inventer de nouvelles formes.

 

D.D. : Grâce à Léopold Sédar Senghor, vous rencontrez Maurice Béjart qui vous confie en 1977 Mudra Afrique, le pendant africain de son école européenne. Quels en étaient les enjeux ?

G.A. : Béjart s’intéressait à ma technique de danse, qui était en train de s’élaborer. Cela a constitué une reconnaissance politique très importante, et essentielle pour la suite.

 

D.D. : Après de multiples récompenses et décorations partout dans le monde, vous venez de recevoir le Grand prix de chorégraphie de l’Académie des beaux-arts. Comment avez-vous réagi ?

G.A. : Cela a été une grande surprise et j’ai éprouvé une intense émotion, car ce prix permet d’aider de jeunes chorégraphes, ce qui rejoint l’esprit de l’École des Sables. Recevoir ce Grand prix sous la Coupole du Palais de l’Institut de France, où le poète Senghor a été célébré et où l’immense sculpteur Ousmane Sow a été accueilli, a été extrêmement émouvant pour moi. 

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Les artistes soutenus par Germaine Acogny

Ange Kodro Aoussou-Dettmann

Ange Kodro Aoussou-Dettmann
Danseuse, chorégraphe et professeur de Danse Africaine, Modern Jazz et Danse Contemporaine.
Photo DR

 

 

 

 

Rachelle Agbossou

Rachelle Agbossou
Danseuse, chorégraphe et professeure de danse.
Photo Marcel Gbeffo Multicorps

 

 

 

 

Amadou Lamine Sow

Amadou Lamine Sow
Connu sous le nom de Pi, danseur, interprète et professeur.
Photo École des Sables