Le Pavillon Comtesse de Caen

Gérer un patrimoine d’exception
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Le Pavillon Comtesse de Caen, lieu affecté à l’usage exclusif de l’Académie des beaux-arts dans l’enceinte du Palais de l’Institut de France, est un outil central de la politique de soutien aux artistes conduite par l’institution et de son rayonnement.

 

Vue de l’exposition « Éloge de l’abstraction ». Photo Patrick Rimond
Le public devant le Pavillon Comtesse de Caen lors de l’exposition collective « Émulations » présentant les projets des finalistes du concours d’architecture de l’Académie des beaux-arts 2023. Photo Patrick Rimond

 

Figurée dans une gloire très néoclassique, « couronnée par la Villa Médicis », au plafond de la première salle du Pavillon, Anne-Sophie Marchoux, « Comtesse de Caen », est ce personnage romanesque qui, par l’importance du legs qu’elle lui accorde en 1870, devient une des bienfaitrices de l’Académie. Son geste généreux permet toujours à l’institution, 150 ans plus tard, de soutenir les artistes et la création d’aujourd’hui. Le produit de ce legs (au sein duquel figuraient par ailleurs les parts majoritaires de la galerie Vivienne, à Paris) avait pour objet de permettre aux peintres, sculpteurs et architectes titulaires du Prix de Rome de s’installer à Paris à leur retour de la Villa Médicis, d’y produire et de s’y faire connaître à l’abri de tout souci matériel, et ce pendant trois ans.

En retour, le testament demandait au peintre un tableau, au sculpteur une statue, à l’architecte une étude, aquarelle ou croquis dont le sujet était entièrement libre. Anne-Sophie Marchoux, elle-même artiste peintre et sculptrice, était bien placée pour savoir que la liberté se situait au cœur du processus de création.

 

Plafond du Pavillon Comtesse de Caen. Photo Patrick Rimond
Plafond du Pavillon Comtesse de Caen, François Schommer (1850-1935), La Villa Médicis couronnant la comtesse de Caen, huile sur toile, 1883. Photo Patrick Rimond

 

C’est pour accueillir ces œuvres qu’en 1872, l’Institut de France attribue un espace, situé au rez-de-chaussée du pavillon occidental du Palais (intitulé alors « Pavillon des Arts ») à l’usage unique de l’Académie des beaux-arts. Outre ces expositions, le site accueillera également à partir de 1916 des concerts mensuels institués par Charles Marie Widor, dont l’orgue a trôné en majesté dans la troisième salle du Pavillon de 1915 à 1980 !

Cet espace d’exposition qui a pris successivement le nom de « Musée de Caen » et de « salle Comtesse de Caen », a bénéficié d’une importante rénovation en 2019, sur les plans et la scénographie généreusement offerts par Jean-Michel Wilmotte, membre de la section d’architecture de l’Académie des beaux-arts. Il a rouvert à l’automne 2019 avec l’exposition des œuvres du photographe indien Raghu Rai, premier lauréat du Prix de photographie William Klein nouvellement créé par l’Académie et a repris à cette occasion sa dénomination originelle de « pavillon ».

Le Pavillon Comtesse de Caen occupe un emplacement géographique exceptionnel, dans l’hypercentre parisien et au débouché du Pont des arts ; il se présente ainsi comme un lieu de découverte idéal pour les promeneurs toujours très nombreux dans ce quartier emblématique de la capitale. Mais il marque également le début du « triangle d’or » artistique formé par les rues de Seine, Mazarine, Buci, Dauphine et leurs célèbres galeries. Sa fréquentation est donc très intéressante à observer puisqu’elle se répartit entre les touristes français et étrangers (ces derniers représentant 30 à 50 % des visiteurs en fonction des périodes de l’année) et les professionnels de l’art qui apprécient beaucoup ce lieu de défrichage des nouveaux talents. L’exposition du Prix de Dessin Pierre David-Weill est à cet égard particulièrement attendue par les galeristes voisins.

L’alignement formé, au niveau des quais Malaquais et Conti, par les grandes écoles et institutions que sont les Beaux-Arts de Paris, l’Ecole nationale supérieure d’architecture Paris-Malaquais et la Monnaie de Paris constitue également un autre réseau naturel du Pavillon ; les collaborations fructueuses débutées avec la Monnaie de Paris autour de la Villa Dufraine avec l’exposition Bonsoir Mémoire à l’automne 2023, les Beaux-Arts avec la toute prochaine exposition consacrée au peintre membre associé étranger de l’Académie Leonardo Cremonini, ou l’Ecole nationale supérieure d’architecture Paris Malaquais à l’occasion de l’exposition des lauréats du nouveau Concours d’Architecture, illustre la vitalité de ces liens institutionnels et artistiques.

 

Vue de l’exposition « Éloge de l’abstraction ». Photo Patrick Rimond
Vue de l’exposition « Éloge de l’abstraction » par la Fondation Gandur pour l’Art. Photo Patrick Rimond

 

La programmation de l’espace se répartit entre les expositions liées aux concours organisés par l’Académie, en dessin (Prix Pierre David-Weill), gravure (Prix Mario Avati), photographie (Prix Marc Ladreit de Lacharrière), architecture (Concours et Grand Prix d’architecture) notamment, les hommages à des artistes membres de l’Académie récemment disparus et d’autres expositions spécialement conçues pour le lieu ; on peut citer parmi elles ces dernières années l’exposition Biographies dessinées d’Emmanuel Guibert qui marquait la première exposition de bande dessinée organisée au Pavillon (2020) ou encore celle des photographies de Charlotte Perriand en liaison avec la grande exposition consacrée par la Fondation Vuitton à l’architecte et designeuse. Nous y accueillons également chaque année les artistes en résidence à la Casa de Velázquez. 

L’inscription, ces dernières années, des expositions du Pavillon dans les agendas des grands rendez-vous culturels parisiens (Paris Photo, Paris + la Biennale, Salon du Dessin…) a intégré l’espace à la programmation des grandes institutions culturelles contemporaines et en a fait un lieu prescripteur pour les professionnels de la culture, ce dont la presse artistique s’est fait largement l’écho.

Du côté du public, des expositions comme celle d’Annie Leibovitz (automne 2021) ou tout récemment, Éloge de l’abstraction organisée avec la Fondation Gandur pour l’art (automne 2023), ont été fréquentées respectivement par plus de 18 000 et 16 000 personnes en 6 semaines. Avec plus de 60 000 visiteurs en 2023 et même si rien n’est jamais acquis en termes de fréquentation, le Pavillon a, semble-t-il, aujourd’hui trouvé son public.

Enfin, et ce n’est pas un détail, toutes les expositions présentées au Pavillon Comtesse de Caen sont gratuites, ce qui représente naturellement un investissement très important pour l’Académie mais permet également d’accueillir largement les étudiants et des publics socialement moins favorisés. Un choix qui n’aurait sans doute, pas déplu, en tout cas nous l’espérons, à Anne-Sophie Marchoux, Comtesse de Caen.

 

Hermine Videau, directrice de la communication et des prix de l’Académie des beaux-arts

 

Annie Leibovitz. Photo Juliette Agnel
Annie Leibovitz, membre de la section des associés étrangers, photographie la perspective de la Seine depuis le Pont des Arts, devant l’Institut de France. Au premier plan le Pavillon Comtesse de Caen. Photo Juliette Agnel